Multiples-ruraux à Malbo et Val d’Arcomie : à la rencontre des porteurs de projets

Dans les communes de Malbo et Val d’Arcomie (Faverolles et Loubaresse), Saint-Flour Communauté confie la gestion et l’exploitation des « multiples ruraux » à des porteurs de projets, pour permettre le maintien de services dans les petites communes rurales et contribuer au maintien des liens sociaux. Cette année, malgré la crise sanitaire, chaque établissement a connu des évolutions.
Rencontre avec les gérants.
À Malbo
Julien et Victoria Ayral – La Femme du Barbu

D’une cuisine marquée par les embruns de La Rochelle à celle inspirée des hauteurs du Cantal, il y a un sacré pas. Julien Ayral, alias « Le barbu », l’a franchi, avec sa femme Victoria.
Un coup de cœur
Malbo a été un coup de cœur. « Nous sommes venus à l’automne, il faisait beau, l’air était frais et il y avait de belles couleurs. On est tombé amoureux de ce coin », nous assure Julien. Parents de trois enfants (de 3, 5 et 13 ans), Julien et Victoria avaient envie de travailler ensemble. Lui œuvrait en tant que chef exécutif dans un restaurant semi-gastronomique italien pour le compte de Johan Leclerre, Meilleur ouvrier de France, et elle, en tant que préparatrice de desserts de mariages de prestige, sur l’île de Ré. « Nous souhaitions partir, pour nous, notre famille, mais aussi pour l’expression, la liberté et pour faire ce qui nous représente », lance encore Julien. « Nous nous sommes très vite projetés ici. Le défi était de trouver un commerce qui corresponde à notre famille avec logement attenant. Quand on a vu cet endroit, on a tout donné pour transposer notre projet ici », ajoute Victoria.

Le projet justement s’inscrit dans une éthique « locavore » : proposer une cuisine issue des produits locaux.
« On se fournit dans un circuit de 70 km maximum. La viande de Salers provient de la montagne d’à-côté, l’Aubrac de l’autre. On travaille sur du circuit super-court », explique la femme du barbu, avant que ce dernier ne précise : « On ne triche pas. On travaille sans congélateur, sans micro-onde et avec un seul frigo. Tout est frais. On arrive à être juste, à ne pas jeter. »
Surprendre grâce au subtil jeu des saveurs, des textures
Côté goût, qui dit valorisation de produits locaux entend cuisine de saveurs et de textures. Au fil de son parcours, « le barbu » a acquis un style, ose créer des alliances originales pour surprendre.
« Nous avons ouvert le 16 mars 2020, c’est-à-dire au début du confinement imposé en raison de la crise du coronavirus. Finalement, quand on y repense, cette situation nous a permis d’ajuster notre projet, pour comprendre quelles étaient les attentes. Pendant un week-end, nous avons proposé le fameux saucisse-aligot d’un côté et un blanc de poulet tandoori avec des « penne rigate » au crémeux de morilles de l’autre…et nous n’avons vendu que 2 aligots. Nous avons tout de suite compris que les gens souhaitent des plats qui sortent de l’ordinaire », lance t-il.
C’est ainsi que le bœuf Aubrac va être cuisiné autrement : « Je le cuisine à la japonaise, avec un bouillon très puissant « retour de Kyoto », comme on l’appelle. Il y a une fraîcheur rendue grâce au gingembre, à la citronnelle, au citron vert… c’est explosif. Et c’est ce que nous souhaitons faire découvrir à nos clients : éveiller les sens du palais et voir le sourire quand l’assiette est posée. »

« Nous avons réalisé notre rêve de travailler ensemble »
Aujourd’hui, avec près de 8 mois de recul, le couple ne regrette rien. Les doutes du début de l’aventure sont derrière. « Nos proches nous avaient conseillé de se laisser porter. Et on l’a fait. Nous sommes allés au bout de notre projet en réalisant notre rêve de travailler ensemble, d’avoir des gens contents, de servir de belles assiettes… » Le projet séduit. Les locaux ont fini par adhérer au projet. Et le bouche-à-oreille a fait le reste pour attirer les gourmets, la « grande couronne » (pour reprendre leur formulation) d’Aurillac à Saint-Flour, en passant par le nord-aveyron… « Même le maire, quand il va à Aurillac, il entend parler de Malbo. Et ça c’est un bonheur ! », s’amuse Victoria. « Certains clients qui se sont arrêtés ici ont l’habitude de manger dans des grands restaurants et me comparent parfois à de grands chefs… C’est incroyable ! », se souvient encore Julien.
Un fonctionnement à l’ardoise
À Malbo, le couple a opté pour un fonctionnement « à l’ardoise » avec un choix parmi 3 entrées, 3 plats et 3 desserts et un changement tous les 3 jours. « À moins qu’un client nous appelle et nous dise qu’il a adoré un plat ! », sourit Victoria. « On veut rester à échelle humaine et faire en sorte que les gens se sentent comme dans leur salon. »
Pour cela, la décoration intérieure y fait beaucoup : un jeu sur le cordage, des cloches offertes par un agriculteur local accrochées sur des poutres au plafond. « C’est rustique et ça reste moderne », commente Victoria. Le mieux pour s’en rendre compte est d’y aller. Un peu de patience car, actuellement, le confinement ne le permet pas.

Le coup d’œil du chef :
« Même si j’ai beaucoup appris en travaillant aux côtés et pour un Meilleur Ouvrier de France, je n’oublie pas non plus les « petits chefs » moins connus qui m’ont transmis la passion de la cuisine. Mon apprentissage, je l’ai fait un peu comme un dégénéré. J’ai passé des soirées à travailler des kilos de légumes pour faire le tournage parfait, pour faire le ciselage parfait. J’ai goûté beaucoup d’éléments tout seul. Et aujourd’hui, je n’ai pas de cahier de recettes… Certains de mes chefs me tueraient d’ailleurs ! (rires) Les gens cherchent sans doute cette différence parce-que je ne fais jamais 2 fois la même chose et parce-que je cuisine au feeling. Je sais où je vais si je mets tel ou tel ingrédient… Mon style ? Je me plais à éclater les éléments dans l’assiette. »

La Femme du Barbu
Bar-restaurant des hauteurs
1, rue des Cassalouts
15230 MALBO
09 52 69 41 07
Sur Facebook : lafemme.dubarbu
Sur Instagram : @lafemme.dubarbu
À Faverolles (Val d’Arcomie)
Nadine Coutarel – L’Epicerie de Faverolles (Chez Nadine)

Nadine Coutarel est bien connue à Faverolles. Elle y est originaire. Et depuis le 2 juillet 2018, elle a repris le multiple-rural qui propose des services d’épicerie.
Un rythme intense, toute la semaine
Un vrai changement après avoir travaillé dans le milieu de la grande distribution. « J’ai été à bonne école. Cette expérience m’a beaucoup servi avant que je ne reprenne l’épicerie », déclare t-elle aujourd’hui. Depuis plus de 2 ans, Nadine a les mêmes habitudes : réveil à 5h, « j’ouvre l’épicerie de 7h à 12h30 tous les matins, sauf le jeudi, et de 17h30 à 19h30. Car l’après-midi, je suis en tournée ! » Car, en plus de l’épicerie, Nadine a poursuivi le passage dans les communes en camion. « C’est un rythme intense car il faut charger et décharger chaque jour le frais, les fruits, les légumes…mais c’est un vrai service. Cela permet de maintenir un lien dans les coins isolés. Et j’ai une super clientèle. Il y a vraiment une belle relation. On s’adore, on rigole bien. C’est sympathique. J’ai souvent du stress dans ma tournée, mais une confiance s’est instaurée. Parfois, je fais même des frustrés qui aimeraient que je reste prendre le café. Mais aujourd’hui, c’est compliqué vu la situation… »

En effet, ce service itinérant a joué (et joue) un rôle fondamental pendant les confinements liés au coronavirus Covid-19 de mars à juin et depuis fin octobre. « J’ai multiplié par 3 mon nombre de marchandises ! Les journées étaient très chargées, je travaillais entre 16 et 17 heures par jour… J’ai perdu 2 kilos ! (rires) » Pour le confinement actuel, c’est différent étant donné que les déplacements liés au travail ou aux écoles sont maintenus. Cependant, les clients lui sont reconnaissants. « Certains m’ont dit après le premier confinement que ça avait été une chance de pouvoir compter sur moi, ça fait forcément plaisir. »

L’espace de vente agrandi de 12 m²
Récemment, elle a réalisé des aménagements intérieurs dans son épicerie pour agrandir son espace de vente. Des travaux réalisés par Saint-Flour Communauté pour disposer des 12 m² de l’ancienne réserve. « Je suis contente du résultat, car cela m’a permis de récupérer de la lumière. On a maintenant vraiment l’impression de rentrer dans une supérette, c’est moins serré, moins entassé », se satisfait-elle.

En projet : Nadine réfléchit à agrandir la zone de distribution dans le cadre de ses tournées. « Pour cela, il va falloir que j’embauche pour tenir la boutique. Ça va peut-être pouvoir se faire ! »
L’Épicerie de Faverolles – Chez Nadine
Dépôt de pain, produits du terroir, épicerie, produits frais (légumes, fromages, yaourts…) et surgelés
Faverolles
15320 VAL D’ARCOMIE
06 76 30 83 42
Visitez le site Internet
Sur Facebook : L’épicerie de Faverolles
À Loubaresse (Val d’Arcomie)
Élisabeth Da Silva et Jean-Claude Cusset – Le Drop

Venus tout droit de Cournon d’Auvergne, Élisabeth et Jean-Claude viennent de poser leurs valises à Loubaresse, pour reprendre la gestion du multiple-rural « Le Drop ».
En raison de la situation proche de l’autoroute A75, le lieu est idéal pour pouvoir rendre visite rapidement à la famille restée à Cournon-d’Auvergne, mais aussi, pour accueillir les routiers. « Nous avons un parking pour permettre aux routiers de dormir. Nous proposons repas, douches et petit-déjeuners », explique Jean-Claude, lui-même ancien routier, satisfait de pouvoir côtoyer d’anciens « collègues ».
Tout quitter pour enfin s’installer ensemble
Le couple souhaitait depuis longtemps monter une affaire ensemble. À 53 ans pour elle, 57 pour lui, l’année 2020 est la bonne. Tout commence en janvier : Élisabeth, déjà serveuse et cuisinière dans un restaurant, a le coup de cœur pour Loubaresse. « Jean-Claude connaissait le lieu car il s’y arrêtait quand il était routier, il m’a d’abord montré des photos. Puis on a visité et on a vraiment apprécié le lieu : il est bien placé, adapté pour travailler, dans un bon état… », explique Élisabeth. Puis, avant que n’intervienne le premier confinement en mars, le dossier est envoyé.
Après une rencontre « par visio » en juin, le couple est choisi. « On pensait pouvoir ouvrir en septembre, mais nous avons dû attendre que Saint-Flour Communauté termine de faire quelques travaux, au comptoir notamment », précise Jean-Claude. Chemin faisant, Élisabeth et Jean-Claude démarrent leur activité au moment où le deuxième confinement lié à la crise sanitaire est prononcé, en cette fin octobre 2020. Pas de quoi les démobiliser… : « Ce sont de drôles de conditions pour démarrer, c’est sûr, mais nous restons positifs. Au moins, on peut peaufiner les derniers détails et finaliser notre installation ! », lance Elisabeth.

Faire du Drop un lieu de vie
« Nous sommes ravis de pouvoir rouvrir ce multiple-rural. On a besoin de ces petits commerces ! On a des idées, on veut faire en sorte que les gens aient plaisir à se rassembler chez nous. » Les propos d’Élisabeth sont donc clairs : faire en sorte que ce lieu soit vivant ! Même son de cloche pour Jean-Claude : « On veut être à l’écoute de tout le monde, rendre service. L’idée est d’être complémentaire des associations et proposer Le Drop quand elles organiseront des concours de belote, de pétanque ou autre… »

Fait-maison, pâtisserie et Portugal…
En cuisine, le fait-maison est de rigueur avec des fournisseurs locaux. Élisabeth, aux fourneaux, proposera un menu du jour traditionnel et il y aura aussi une petite carte. « Je proposerai également des gâteaux d’anniversaire. J’adore faire la pâtisserie », glisse t-elle. Le Portugal sera aussi de la partie… « Je suis d’origine portugaise. C’est aussi l’occasion de faire goûter les spécialités, et notamment le poulet rôti à la façon portugaise : il est mariné pendant 24h… Un délice ! », lance t-elle, enthousiaste, sous l’œil gourmand de son compagnon.
Le Drop
A75, sortie 31
Loubaresse
15320 VAL D’ARCOMIE
04 71 23 40 64